Lens et la Perse, deux
mondes, deux ambiances, deux climats. Et pourtant l'Iran du XIXe
siècle pose ses valises somptueuses en laque et pierres précieuses
au musée du Louvre-Lens pour une exposition dépaysante et riche,
dans tous les sens du terme. A travers quatre pièces et de
nombreuses œuvres, objets et tapis, on découvre la dynastie qajare,
shahs d'Iran de la fin du 18e siècle à 1925. Je vous emmène avec
moi pour voyager dans le temps et le luxe persan au cœur du Pas de
Calais (on dirait un kamoulox) …
Deux visites, deux
ambiances et deux émerveillements. L'an dernier, j'avais découvert
le musée du Louvre-Lens grâce à mon amie Emma de Vague Culturelle, et j'ai mis les pieds pour la première fois à Lens pour
découvrir l'exposition sur les frères Le Nain, peintres du
XVIIe siècle. Complète, intéressante, l'exposition permettait
aussi au visiteur de se questionner à son tour sur certaines œuvres,
identifier ou non un Le Nain. J'adore observer les détails de
peinture, les techniques, mais aussi m'amuser sur certains points du
tableau, qu'on ne remarque pas de prime abord. Tout m'avait donc plu,
et j'avais ensuite découvert la Galerie du Temps et sa scénographie
originale. Je m'étais promise de revenir pour une prochaine
exposition, c'est chose faite.
« L'empire
des roses, chefs-d’œuvre de l'art persan au 19e siècle » me
promettait une nouvelle visite instructive et complète. En plus,
cela me promettait un peu de dépaysement, découvrir une nouvelle
culture, à l'instar de mes visites au musée du Quai Branly !
Autant dire que je n'ai pas hésité longtemps pour revenir. Mais de
quoi parle l'exposition, exactement ? L'Iran (ou la Perse) était
gouvernée par le shah, et tout comme nos rois, ils fonctionnent en
dynastie. L'exposition se centre sur les Qajars,
famille régnante de 1786 à 1925, apportant tout son
lot d'histoire, mais aussi d'art et de création. Sept chats (... bon d'accord, c'est facile) se sont
succédé en un peu plus d'un siècle, et l'art au service du royaume
a évolué selon les goûts, d'un style traditionnel à la modernité,
avec l'influence de l'Occident, l'arrivée de la photographie. Bien
sûr au milieu de tout cela, les voyageurs occidentaux de l'époque
sont venus découvrir la Perse et ses trésors, en ont ramené des
croquis et autres superbes dessins. Tout ceci se retrouve dans
l'exposition, et sa scénographie soignée. Christian Lacroix a
signé la scénographie magnifique, divisée en quatre sections aux
couleurs chatoyantes et à l'architecture rappelant les palais
qajars. Partons maintenant dans l'exposition !
Section 1 –
Impressions persanes
Pour commencer, on voit à
travers les yeux d'occidentaux venus étudier l'Iran, notamment le
peintre Jules Laurens et l’architecte Pascal Coste.
Et plus contemporain, cette tenue de danse dessinée par Christian
Lacroix pour le ballet Shéhérazade de Bianca Li.
Dés le début, on en prend plein la vue. La tenue est sublime, les
dessins d'une qualité et d'un détail incroyable, et les tableaux
enchanteurs. Rien que là, j'étais conquise dans la pièce bleue, et
je n'avais encore rien vu.
Sur les toits d'Ispahan, de Joseph Laurens, 1865 |
Section 2 – Bâtir
un empire
Les quatre pièces rouges
permettent de découvrir la dynastie qajare au travers des portraits
des souverains. Si le portrait de Fath Ali Shah (1797-1834, deuxième
qajar) se veut très traditionnel, loin des canons occidentaux,
l'évolution se fait sentir chez ses successeurs, comme Muzaffar
al-Din Shah (1896-1907, 5e shah) avec un portrait bien
moderne pour l'Iran de l'époque. Et l'avènement de la photographie
a aussi permis de se mettre en scène et de montrer une image plus
réaliste, bien qu'au service du pouvoir.
Fath Ali Shah en trône, attribué à Mirh Ali, 1800s |
Portrait de Nasin al-Din Shah, par Victor Darjou, 1858 |
Portrait de Muzaffar al-Din Shah, par Samsam, 1904-5 |
Portrait de Muhammad Ali Shah, 1907-9 |
Parmi les œuvres
picturales, Napoléon 1e fait un petit coucou sur un tableau.
La Perse a envoyé des ambassades à travers l'Europe pour conclure
des alliances et montrer leur ouverture au monde. Et inversement bien
sûr, il y a eu des ambassadeurs français en Perse, tout comme dans
l'empire ottoman ou des contrées exotiques pour les européens.
Napoléon 1e reçoit l'ambassadeur de Perse au château de Finkenstein, par F-H Mulard, 1810 (Château de Versailles) |
Cette partie permet aussi
de montrer les goûts des différents souverains à travers des
bijoux, mobilier, céramiques, d'imaginer le luxe dans lequel ils
vivaient, notamment au palais du Golestan, à Téhéran.
Section 3 –
Paraître, apparaître : le Shah, la cour et l'image
Les pièces vertes
présentent les arts de la cour dans l'esthétique de la dynastie
qajare. On y retrouve notamment des bijoux (que je n'ai pas toujours
pu prendre en photo du fait de la restriction), mais aussi mon autre
passion : la mode. Elle évolue avec Nasser
al-Din Shah, premier shah à visiter l'Europe, les femmes
portent des jupes plus courtes, comme des ballerines, par exemple !
Section 4 –
Gouverner les arts
Les deux dernières
pièces jaunes montrent l'évolution des artistes et leurs
techniques, avec une volonté d'excellence et de modernité en
adéquation avec le modèle européen. On y retrouve la céramique,
la musique, la vaisselle, le dessin, mais aussi la photographie.
Nasser al-Din Shah était un passionné de photographie, a
rempli des albums entiers de photos de la famille royale mais aussi
de l'Iran de l'époque.
L'appareil photo de Nasser al-Din Shah |
Difficile d'expliquer une
exposition comme celle-ci sans trop entrer dans les détails. Il vaut
mieux la visiter, lire les cartels et les panneaux pour mieux
s'imprégner. Les quatre sections aux quatre couleurs se révèlent
complètes aussi bien en œuvre qu'en explication pour le visiteur
n'ayant pas les bases de l'histoire et la culture persane. Bien sûr
après, un petit tour à la Galerie du Temps s'impose, ce serait
dommage de ne pas en profiter !
Encore une fois, j'ai
aimé l'exposition et je ne peux que la conseiller si vous êtes dans
le coin ou à Paris. En effet avec le train, Lens n'est qu'à une
heure de la capitale, et une navette gratuite vous emmène et vous
ramène à la gare. De notre côté, nous avons pris la navette à
l'aller et la promenade verte au retour pour débriefer de notre
visite du jour avant d'aller déjeuner ! Dépêchez vous,
l'exposition est encore visible jusqu'au 23 juillet !
Musée du Louvre-Lens
99, rue Paul Bert 62300
Lens
10-18h (fermé le mardi)
Tarif plein : 10€