lundi 22 mai 2017

22 mai 1886 : Mariage d'Amélie d'Orléans et de l'héritier du Portugal


Amélie d'Orléans et Don Carlos du Portugal, héritier du trône, se marient en ce jour. Et mai n'est-il pas la saison des mariages ? Bien sûr, qui dit mariage princier, dit mariage arrangé. Mais on peut parler un peu d'amour aussi, mais surtout de luxe et de grandeur pour cette union ! Sans le savoir, les portugais assistent au dernier mariage de la dynastie régnante ... 

Avant que le Portugal ne s'enfonce dans une révolution pour renverser la monarchie comme dans tous les pays d'Europe (ou presque), c'était un pays tranquille, gouverné par la même famille, les Bragance, depuis l'indépendance du royaume en 1668. Sous le règne de Luis 1e, l'économie se porte bien, tout comme les colonies, la politique intérieure et extérieure. Populaire, la famille royale se voulait proche du peuple. Alors quand la nouvelle future de Bragance, Amélie d'Orléans, arriva par le train, le peuple l'accueillit avec joie. Mais avant de parler du mariage, qui sont les protagonistes.



Dame de cœur, à vous l'honneur. Amélie d'Orléans, née le 28 septembre 1865, est la fille de Philippe d'Orléans, comte de Paris, et sa cousine Marie-Isabelle d'Orléans. Double arrière-petite-fille du dernier roi, Louis Philippe 1e, elle grandit en exil en Angleterre où elle côtoie l'aristocratie britannique, avant de rentrer en France après la fin de la loi d'exil en 1871. Pendant ces années, elle voit son père espérer reprendre le trône de France. Il faut dire que le début de la III République est assez houleuse, tout est encore possible : bonapartistes, républicains et royalistes sont au coude à coude pour imposer sa vision de la France. On peut noter son physique un peu hors norme pour l'époque : très grande, elle mesure environ 1m75 et possède des épaules assez forte et un visage assez masculin. Enjouée et sympathique, la jeune fille cache un tempérament nostalgique et profondément meurtri. Avec un père retenu par la politique et une mère autoritaire, elle a du mal à se faire une place au milieu de la grande famille d'Orléans aux personnalités éclectiques ! Fiancée à l'héritier du Portugal, une grande fête est organisée à l'hôtel Galliera (actuellement l'Hôtel Matignon) dans un tel luxe que les républicains s'offusqueront. A tel point qu'une nouvelle loi d'exil sera voté et adopté le mois suivant, le 22 juin, condamnant les prétendants au trône de France et à leurs fils de ne plus séjourner sur le sol français, et ce jusqu'en 1950 ! Mais nous ne sommes pas là, revenons à Amélie et sa joie de revoir son fiancé, qu'elle aime déjà !

Dom Carlos, futur roi Carlos 1e, est le fils du roi Luis 1e, dit le Populaire, et Maria Pia de Savoie. Né le même jour que sa belle mais deux années plus tôt, le 28 septembre 1863, il est l'aîné d'un autre frère, et est donc appelé un jour à succéder à son père. Grand blond aux yeux clairs, il est clair qu'il n'a rien d'un portugais comme on pourrait le supposer, mais il ressemble beaucoup à son père. Intelligent et instruit, il pratique le tour d'Europe, notamment en Italie dans la famille de sa mère, en Angleterre où il se lit d'amitié avec le futur Édouard VII, en Allemagne où il échoue une tentative de fiançailles avec une des filles de l'empereur, et aussi en France. En janvier 1886, il se présente à la famille d'Orléans et à sa fiancée, puisque les négociations ont abouti à une acceptation des deux familles.



Il est donc temps de célébrer le mariage, non ?

Le marquis de Flers, proche du père de la mariage, le comte de Paris, raconte le jour du mariage avec grande précision. Par cette journée du 22 mai 1886, il faisait beau et doux dans le ciel de Lisbonne. Il y avait foule sur les routes où passaient le cortège de carrosses, il faut dire que ce jeune couple était déjà très populaire par leur douceur et leur gentillesse, donnant une bonne image de l'avenir réservé au Portugal. Tout est décoré de mâts à étoffes rouge avec des couronnes royales.

Le cortège quitte le palais d'Ajuda à 13h, tous les carrosses sont de véritables pièces d'orfèvre datant pour la plupart du 18e siècle, ils sont aujourd'hui visibles au musée des carrosses de Lisbonne. Avant les mariés, tout un tas de personnalités ouvrent le cortège, dont l'ambassadeur d'Espagne. Vient ensuite la cavalerie, les piqueurs qui se placent devant l'église. Puis l'arrivée du roi Luis 1e et de la reine Maria Pia de Savoie, sublime dans son costume copié d'un tableau de Rubens Le triomphe de Marie de Médicis ; puis arrivent les parents de la mariée, avec Philippe d'Orléans, comte de Paris, avec le cordon rouge et vert du Portugal, et son épouse la comtesse de Paris dans une sublime robe rose et dorée.

Puis enfin les mariés arrivent. Amélie d'Orléans prend le bras de son père pour être menée jusqu'à l'autel.Dans l'église Santa Justa et Rufina, on voit des tentures de velours de soie multicolores tendues sur les murs, des lustres en cristal. Le dais royal est recouvert lui aussi de tentures fleurdelisées d'or cette fois. Au centre du chœur, deux fauteuils de velours bleus sont près à accueillir les futurs époux. Juste au-dessus d'eux, une énorme couronne ducale supportée par deux anges et décorée des torches de l'Hymen. Évidemment, il y a foule et que du beau monde : la famille d'Orléans et de Bragance bien sûr, mais aussi toute l'aristocratie, la cour, le corps diplomatique … tous ont revêtu leurs plus beaux habits et uniformes pour l'occasion.

Après l'homélie, Carlos va vers ses parents et baise les mains du roi son père et de sa mère pour consentir au mariage. Amélie fait de même avec ses parents. Vous vous doutez qu'il ne s'agit que de formalité, il y a bien longtemps que le mariage fut conclu entre les parents ! C'est l'heure des anneaux avec la bénédiction nuptiale. Pour que le peuple puisse partager cette joie, un Te Deum est sonné. Dehors, les canons tonnent et un feu d'artifice est lancé, et les désormais époux apparaissent sur le perron de l'église. La foule exulte de joie de voir ce couple si heureux.

Quel contraste ce soir ! Après le faste de toute une ville, le repas du soir se fait en tout intimité, juste en famille. Enfin, ça fait un peu de monde tout de même, mais loin de la cour et du grand spectacle qu'on pourrait imaginer. En cadeau, la désormais duchesse de Bragance se voit offrir par le roi un diadème en diamants, et la reine lui fait cadeau du collier assorti. Après la première nuit ensemble, où Amélie eut sa première fois comme souvent à cette époque, il faut maintenant reprendre les mondanités avec les grands du royaumes et les hauts fonctionnaires, avant de se changer à nouveau pour la première apparition en public au théâtre pour un gala, où le couple fut ovationné, public debout vers eux. Sans doute ont-ils eu plus de succès que ce qui se produisait sur scène. Le lendemain encore, nouvelle réception, avec le corps diplomatique cette fois-ci, et avec l'armée le surlendemain, avec grande fête pour le peuple de Lisbonne le soir. Après des courses de chevaux le 26, les festivités du mariage se terminèrent le 27 (soit 5 jours après les noces), par une corrida, mais sans mort pour l'animal.

Après tout cela, le couple se retire au palais de Bélem pour savoir un peu de repos bien mérité. Et une petite lune de miel aussi …


Autant profiter de ce bonheur puisqu'il ne dura pas … Mais non, pas de tristesse, on aura bien le temps d'aborder ces questions, profitons de ces jours de fêtes à la portugaise ! Vive les mariés !

3 commentaires:

  1. Bonjour ou puis-je trouver les détails de la réception du mariage dans quel livre ou fond d'archives

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  2. Bonjour où puis-je trouver le détail de la réception du mariage dans quel livre merci à vous

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    1. Bonjour !
      J'ai tiré les informations de différentes sources. Mais surtout : "Moi Amélie, dernière reine du Portugal" de Stéphane Bern, il a eu accès aux vrais carnets d'Amélie d'Orléans.

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