La Basilique Saint
Denis est un symbole de la monarchie française, tout comme le
château de Versailles ou d'autres châteaux. Les rois s'y font
enterrer depuis des siècles. Et cela reste malgré la Révolution et
les dégradations. Si les corps ne sont plus dans les gisants et
autres tombeaux, la force des lieux reste. Et c'est aussi intéressant
de voir l'évolution de la mise en scène de la mort au court des
siècles avec ces gisants ou cénotaphes. Ouverte au public, la
basilique montre une autre facette de l'Histoire de France, suivez
moi …
Je suis un être peut
être étrange, mais j'adore les nécropoles et les beaux cimetières,
comme celui du Père Lachaise à Paris. Presque à chaque fois que je
visite un pays, j'aime aller dans la nécropole. A Vienne, j'ai adoré
la crypte des Capucins ; à Berlin, je suis entrée dans la cathédrale
et j'ai vu les tombeaux des Hohenzollern ; à Copenhague, la
cathédrale de Roskilde ; à Lisbonne le monastère Saõ Vicente … A
dire vrai, je n'ai pas encore faire Westminster à Londres (c'est sur
la liste ! ) ni celui de Stockholm car il était fermé lors de
ma venue … pour le grand plaisir de Cécile qui déteste ça. En
France, j'ai aussi visite la basilique de Dreux, où les Orléans
reposent. Vous avez compris, j'ai une passion un peu morbide sur les
bords mais il faut avouer que certains tombeaux se révèlent de
vraies œuvres d'art ! Et Saint-Denis n'est pas en reste, bien
sûr !
Je l'ai visitée
plusieurs fois, selon les horaires et les saisons, les vitraux se
teignent d'une belle couleur, donnant cette atmosphère
indescriptible aux lieux. Mais pourquoi cet endroit pour nécropole,
et depuis quand ? Vous avez l'habitude, on récapitule pour
mieux comprendre la visite.
Historique des
lieux
Pour comprendre la
localité, il faut revenir au temps des martyrs chrétiens des
premiers siècles. Pour faire simple, Denis est le premier
évêque de Paris, meurt en martyr entre 250 et 275, les
anciens récits qu'il aurait pris sa tête sous le bras et aurait
marché jusqu'à l'endroit voulu pour sa sépulture. Une sacrée
marche d'ailleurs, et je vous garantis qu'il n'a pas pris la ligne 13
pour y vivre des instants de grâce !
Puis une abbaye y est
construite au Ve siècle, et entama son ascension avec les premiers
rois et reines à y être enterré, dont le roi Dagobert 1e.
Bien sûr, l'église subit des transformations selon les goûts et
les couleurs de l'époque, notamment au XIIe siècle. L'abbé
Suger décide de faire de l'endroit un chef d’œuvre de l'art
gothique. Le plus ironique est que l'abbé a fait cela sous le règne
du roi Louis VII, qui a préféré
se faire enterrer ailleurs, à l’abbaye royale Saint-Port de
Barbeau ! La basilique que l'on connaît aujourd'hui a été
commandé par Louis IX, et c'est à partir de lui que les
souverains se font enterrer là de manière quasi-obligatoire. Seul
le roi Louis XI n'y repose pas, se faisant enterrer à
basilique Notre-Dame de Cléry-Saint-André.
La basilique mènera une
vie tranquille jusqu'à, je vous le donne dans le mille … la
Révolution Française ! Précisément en 1793, un jour
où des gens ont dit que c'était cool de déterrer des morts depuis
des siècles et jouer avec leurs cadavres, leur couper des bouts de
leurs cheveux ou moustaches, et voler la tête d'Henri IV. Ces
révolutionnaires, des gens sympathiques et tolérants …
Autant vous dire que la
basilique n'est pas dans son meilleur état : une partie du
trésor pillée ou fondue en monnaie, des tombeaux cassés, voire
disparus, on pourrait presque penser que sa fin est proche. Mais
Napoléon 1e, soucieux de s'inscrire dans la continuité
dynastique après son sacre, fait entreprendre la restauration des
lieux. Mais le plus gros du travail s'effectue durant la
Restauration. Louis XVIII, frère
de Louis XVI, monte sur le trône et entame de gros travaux
pour redonner l'éclat à la basilique. Tous les corps jetés dans la
fosse commune sont relevés et mis dans un tombeau commun dans la
crypte. Cela fait du monde avec ces 42 rois, 32 reines, 63 princes et
princesses, sans oublier les dix grands du royaume qui ont ce
privilège (comme du Du Guesclin et Turenne). Le
souverain en profite pour ramener certains monarques à la basilique,
notamment Louis VII et Louise de Lorraine. Louis
XVI et Marie-Antoinette
ont aussi leur tombeau, et le dernier a y entrer est Louis
XVIII lui-même. Après lui, Charles X meurt en
exil, et Louis-Philippe 1e repose à la chapelle de Dreux,
nécropole des Orléans.
Petit fait amusant,
Napoléon III avait décidé que sa dynastie reposerait aussi dans la
basilique, dans une aile souterraine. Vous connaissez votre histoire,
le Second Empire s'effondre en 1870 et la famille impériale s'exile
en Angleterre. Si ça vous intéresse, l'ancien empereur, son épouse
Eugénie et leur fils Louis-Napoléon reposent l'abbaye Saint-Michel
de Farnborough.
Quant à la restauration
de l'édifice, il se poursuit durant le reste du siècle, notamment
avec sans doute l'unique architecte des monuments historiques, le
trop connue Eugène Viollet Le Duc. Ce n'est bien sûr pas terminé,
de nombreuses campagnes ont eu lieu pour redonner à l'édifice sa
gloire d'antan, et aujourd'hui, le projet de reconstruire la tour
nord se concrétise !
Ma visite
Comme je l'ai dit en
introduction, j'adore les nécropoles et je n'ai pu qu'aimer cette
visite. Souvent ce sont des lieux souterrains et sombres, notamment
la crypte des Capucins, mais la partie dans la nef, avec les vitraux
colorés, donnent une belle ambiance, calme et reposante. C'est
intéressant de voir aussi l'évolution de de la mise en scène de la
mort. Tout le long du Moyen Âge, ce sont des gisants. Les souverains
sont représentés allongés, souvent entrain de prier, avec quelques
attributs reconnaissables et leurs vertus en symbole. Le 16e siècle
montre l'apogée de l'art funéraire en France avec ces trois
immenses tombeaux : Louis XII et
Anne de Bretagne (mon préféré), François 1e et Claude de
France, Henri II et Catherine de Médicis.
A partir du 17e siècle,
cette mode passe et les cercueils deviennent simples et sont cachées,
on met en place des cénotaphes, monument honorifique mais le corps
ne s'y trouve pas. Les Bourbons utilisent cette méthode et parmi
eux, on retient surtout celui d'Henri IV et de Louis XIV,
un homme extrêmement modeste, jusque dans la mort (je préfère
souligner l'ironie de ma phrase). Le caveau central devait abriter
la dynastie Bonaparte à partir de Napoléon 1e. Encore une
fois, le destin en a décidé autrement : Napoléon est
mort à Sainte-Hélène et son tombeau se trouve aux Invalides,
Joséphine repose à Rueil-Malmaison, Marie-Louise se
trouve à Vienne et l'Aiglon a d'abord été inhumé à Vienne
avant d'être ramené aux Invalides par Hitler en 1940. Pour le
caveau ambiance familiale, on repassera. Mais cette partie n'est pas
restée inhabitée puisque Louis XVIII y a placé des caveaux
très simples pour quelques rois ramenés.
J'aime vraiment cet
endroit et jusqu'au 31 mars 2018 (donc bientôt, la nana qui vend
l'exposition au dernier moment), le Centre des Monuments
Nationaux organise un échange avec la cathédrale Saints
Pierre-et-Paul de Saint Saint-Pétersbourg, nécropoles des Romanov.
On peut y découvrir l'évolution de la Russie, au travers des tsars
les plus connus : Pierre Ie, Catherine II, Alexandre Ie
et Nicolas II. Emma, qui était avec moi ce jour là, vous en
parle bien plus dans son article consacrée à notre journée russe.
Si vous n'avez jamais
foulé le sol de la basilique, allez y. Et si vous connaissez
d'autres nécropoles en Europe ou même ailleurs, n'hésitez pas à
m'en parler !
Oh mais elles sont vraiment belles tes photos !
RépondreSupprimerJ'y avais été et j'avais été juste bouleversée. C'est vrai que même si les corps ne sont plus là... Je me sentais toute petite d'un coup (bien que tous les rois étaient bien plus petits que moi lol !
En tout cas c'est une belle découverte.