Cela faisait un petit
temps que je n'avais pas parlé de mort stupide ! Et là, j'ai
trouvé un champion en la matière. Pourtant, à la base, une mort
par noyade n'a rien de drôle, ni même de ridicule. Même quand il
s'agit d'un empereur, connu aujourd'hui pour sa flamboyante barbe
rousse. Mais pourquoi en parler et rire de sa mort. Laissez moi vous
expliquer …
C'est vrai que j'ai un
peu abandonné les morts stupides au profit d'assassinat ou
d'injustice, voire même de mariages puisque c'est la saison. Mais
celle-ci reste une de mes préférées, j'avais hâte de vous la
raconter. Le pire pour ce pauvre Frédéric, c'est que je connais
assez mal le reste de sa vie et de ses faits d'armes ! Je
propose qu'on lui redonne un peu de crédibilité avant le grand
saut !
Mais
qui est donc Frédéric Barberousse ?
Déjà, il faut savoir
que ce cher Frédéric ne vient pas du caniveau. Il descend de la
famille Hohenstaufen, et de la famille Welf.
Il est aussi apparenté au roi des Romains, Conrad
III, qui n'est autre que son oncle. Autant dire que le
jeune Frédéric part avec un certain bagage. D'ailleurs sur
son lit de mort, le roi Conrad III
(qui n'a jamais été sacré empereur) préconise que son neveu soit
son successeur, au détriment de son jeune fils, lui aussi appelé
Frédéric. Le voilà donc couronné roi des Romains le
9 mars 1152 dans la chapelle palatine d'Aix-la-Chapelle.
Il a trente ans à ce moment là.
Les deux premières
années de son règne servent à repousser les concurrents à la
couronne impériale et surtout pacifier l'Empire car il y en a grand
besoin ! Il faut dire que les deux famille Hohenstaufen et Welf
sont en guerre perpétuelle et Frédéric, devenu Frédéric
Ie, serait le candidat le plus à même de les
réconcilier, ayant du sang de ces deux clans. Il fut ensuite sacré
empereur par le Pape Adrien IV le 18
juin 1155 dans la basilique Saint Pierre de Rome, après
un voyage périlleux ponctué de négociations notamment en Italie,
où il devint le roi la même année. D'ailleurs, sa politique
expansionniste ne s'arrêta pas là : de part son mariage avec
Béatrice de Bourgogne, devenant comte de Bourgogne en 1156,
puis roi de cette région en 1178.
![]() |
Frédéric Barberousse au centre avec le futur Henri VI à gauche et son autre fils à droite |
Il faut dire que le
territoire de l'empire n'a cessé de s’accroître et devint une
sorte de super royaume : allant de la frontière danoise aux
portes des territoires pontificaux au nord de Rome, à l'ouest
prenant les actuels Pays-Bas, une partie de la Belgique, la
Franche-Comté jusqu'au royaume d'Arles (on va dire toute la région
PACA et un peu plus), la Corse, la Sardaigne ; et à l'Est la
République Tchèque et l'Autriche. Très gros morceau de territoire
à gérer, surtout entre les ego des différents seigneurs !
Frédéric Barberousse dut gérer
le grand schisme de 1160, où il soutenait un candidat contre
l'avis du reste de l'Europe, et perdit, dut renégocier avec la
papauté pour rentrer dans les bonnes grâces, tout en prélevant des
impôts en Italie, continuer de gérer le territoire, faire un procès
à son cousin Henri le Lion pour le dépouiller de ses terres
… L'empereur Frédéric Barberousse
avait l'ambition (un peu folle) d'obtenir une souveraineté totale,
loin des négociations avec les différents ducs et princes des fiefs
morcelés. Mais au vu du territoire, cela aurait été un travail
titanesque et harassant. Et par-dessus cela, rajoutez une croisade,
comment peut-on être sur tous les fronts ?
La
croisade de la mort
En 1188, il est
décidé d'une nouvelle croisade, la troisième. En 1189,
Frédéric Barberousse part donc
en terre Sainte avec le roi de France Philippe Auguste et le
roi d'Angleterre Richard Ie Cœur de Lion. Le but est simple :
reprendre Jérusalem au sultan Saladin,
qui tient la ville depuis 1187. Barberousse envoya même une
missive de menace à Saladin, l'obligeant à rendre le royaume de
Jérusalem et restituer son butin pour ne pas provoquer la colère de
Dieu, et le défia au nom de Joseph, père de Jésus Christ.
![]() |
Portrait de Barberousse en croisé, 1188 |
Vu que Barberousse
n'ira pas jusqu'à la fin de la croisade en 1192, je vous spoile la
fin : cette croisade est un échec. Du moins pour la reprise de
Jérusalem, les chrétiens réussissent à reprendre des ports et
autoriser les pèlerins et marchands à circuler librement jusqu'à
la ville sainte. L'empereur avait déjà participé à la seconde
croisade et pensait que la défense Jérusalem était un devoir
sacré. Il partit donc avec treize mille hommes, dont quatre mille
chevaliers, laissant la régence à son fils Henri, futur
empereur Henri VI. Il faut dire
qu'il n'est plus tout jeune, 67 ans en 1189 et avait donc pris toutes
les précautions avant son départ. Après un long voyage éprouvant
et difficile, notamment à cause de bandits turcs s'en prenant aux
croisés isolés et aux voiture de l'infrastructure logistique, les
troupes souffrirent de la faim et de soif. Mais il fallut bien livrer
bataille le 13 mai 1190 contre les troupes du sultan avant de
s'emparer d'Iconium (aujourd'hui Konya en Turquie). Arrivant en
Petite Arménie, les troupes fatiguées furent ravies d'être
accueillis par des chrétiens, qui vivaient en bord du fleuve Saleph.
C'est là que le 10
juin 1190, eut lieu une mort idiote :
Barberousse voulut se rafraîchir en prenant un bain …
avec son armure. Déjà c'est pas malin, mais apparemment l'armure ne
l'aurait pas tué ! Il aurait eu un choc thermique (contraste
entre le corps brûlant et l'eau glacée), et l'armure aurait aidé à
la noyade ! C'est bête mais imaginer un si grand empereur avec
son armure tombé à l'eau en pleine croisade me fait rire !
Surtout qu'il n'avait pas encore rencontré Saladin, donc son défit
contre le sultan tombait … à l'eau. (je sors)
Deux autres hypothèses
existent : l'une où il traversait le fleuve à cheval, l'animal
s'est emballé envoyant son cavalier tout en armure dans l'eau ;
l'autre qu'il voulut la traverser à pied mais le choc thermique
provoqua le choc thermique et l'armure aida la noyade. Dans tous les
cas, cela reste une mort idiote.
Ah, ça me rappelle mes cours d'Histoire médiévale ça ! ! ^^ C'est plutôt intéressant mais difficile à aborder au départ ! J'avais toujours du mal à faire la distinction entre Guelfes et Gibelins, leurs différentes allégeances, leur clientèle...bref...
RépondreSupprimerMais cette époque-là reste malgré tout tellement intéressante et le personnage de Barberousse très charismatique. ;)