Avant de continuer de
vous parler de mon séjour à Lisbonne, je vais vous raconter mes
formidables aventures aux Journées du Patrimoine. Chaque année,
c'est un rendez vous incontournable où je profite de l'ouverture de
lieux exceptionnels, le genre d'endroit où je ne pourrais jamais
mettre les pieds en temps normal. Autant vous dire qu'à Paris, il y
a du choix ! Mon weekend se découpe alors en deux jours :
un samedi intensif et un dimanche pépouze pour me remettre justement
du samedi. Et cette année, j'ai fait du très lourd et je vous en
parle dans la suite de l'article. Vous allez voir, on va voyager !
Comme tous les samedis
des JEP, je suis ultra motivée, et il le faut pour cette première
visite. Avec Emma de Vague Culturelle et mon meilleur ami, nous avons
décidé d'un programme comprenant trois ambassades, une société
secrète, et le lieu le plus visité de ces journées, l'endroit le
plus hardcore : le Palais de l’Élysée ! Et rien
que cette visite nous a achevés !
Le palais de l’Élysée
Comment expliquer …
nous sommes arrivés à 7h30, et nous avons mis 3h30 pour entrer dans
le jardin. Au programme : fouille des sacs, attente, fouille des
sacs et fouille corporelle par la police, attente, fouille des sacs
(et parfois fouille selon ta tête) par la gendarmerie. Là nous
voici dans les jardins de l’Élysée, très mignon et nous voici
prêts à entrer dans la demeure du président. Ah non, il va falloir
encore attendre. Franchement, je m'attendais à ce que le GIGN nous
fouille, au point où on en était !
Si aujourd'hui, le palais
de l’Élysée est connue pour être la demeure du Président de
la République, cela n'a pas toujours été le cas ! Construit
en 1720 pour le comte d'Evreux, Louis-Henri
de La Tour d'Auvergne, puis est acheté par Louis XV
pour sa favorite Madame de Pompadour
en 1753. Autre personnalité haute en couleurs à l'acheter
est Bathilde d'Orléans. Épouse
du dernier prince de Condé, tante du futur roi Louis-Philippe Ie,
elle y vit avec sa famille née hors mariage et organise
régulièrement des soirées autour de l'ésotérisme et les sciences
occultes, invite des magnétiseurs ou des personnalités comme
Catherine Théot. Ambiance ! Changement radical sous le
Consulat quand Joachim Murat le rachète en 1805 et le
redécore somptueusement. On trouve encore des traces de sa
décoration aujourd'hui. En 1848, la IIe République oblige le
président de la République, Louis-Napoléon
Bonaparte, a y séjourner, un peu comme une punition. En
effet, c'est ici que son oncle Napoléon Ie a signé sa
seconde abdication le 22 juin 1815. Sous le Second Empire,
quand Bonaparte devient Napoléon III,
il s'installe aux Tuileries (et à Compiègne), il restaure l’Élysée
et fait aménager un souterrain pour se rendre chez sa maîtresse au
numéro 18 de la rue. Et depuis la IIIe République, les présidents
s'installent dans le palais présidentiel. Un seul a cherché à
loger ailleurs : Charles de Gaulle
détestait la décoration chargé et féminine, plus toute l'histoire
que les murs portaient. Un temps, il voulut s'installer au château
de Vincennes, et occupa de temps à autre le grand Trianon de
Versailles.
On connaît un peu
l'intérieur par quelques photos mais aussi par les conférences de
presse, mais rarement plus. Les différentes files d'attente et
fouilles ont pas mal atténué mon enthousiasme de visite. Bien sûr
les lieux sont sublimes (sauf cet étrange salon années 70
demandé par Pompidou, on se croirait dans Star Trek), j'ai
particulièrement aimé le salon Murat et la salle des fêtes, tout y
est somptueux, on ne sait pas où regarder tellement il y en a. Au
rez de chaussée, il y a une série de tapisseries sur Don Quichotte,
et dans le bureau du président, face à son bureau, c'est « Don
Quichotte guéri de la folie par la sagesse » … j'ai bien
aimé l'ironie ! Si vous avez la patience d'attendre, c'est à
voir. Mais venez tôt !
L'hôtel de Monaco – Ambassade de Pologne
Après avoir survécu au
Palais de l’Élysée et avoir mangé un bout pour reprendre des
forces, direction l'autre côté de la Seine, dans le quartier des
ambassades. La première a été l'ambassade de Pologne. Déjà
visitée il y a trois ou quatre ans, j'adore vraiment cet hôtel
particulier absolument somptueux. Mais, vous avez bien lu hôtel
de Monaco. Que vient faire Monaco en Pologne ?
Tout commence au 18e
siècle avec Marie-Catherine Brignole,
issue d'une très riche famille génoise, qui épouse le prince de
Monaco Honoré III, de vingt ans
son aîné. Jusque là rien de choquant à l'époque, si ce n'est que
l'époux est aussi l'amant de la mère de Marie-Catherine.
Vous suivez ? Après un début de mariage heureux, le prince
jaloux de sa belle épouse, voulut la tenir recluse dans leur hôtel
particulier puis à Monaco ! La belle s'enfuit dans un couvent,
et les époux se séparèrent. Honoré III allait de maîtresse
en maîtresse, et Marie-Catherine Brignole
put vivre d'amour avec son amant, le prince de Condé. Elle
fit donc construire cet hôtel particulier en 1774 par l'architecte
Alexandre-Théodore Brongniart, non loin de la demeure de son amant.
Amant puis époux d'ailleurs ! Le prince de Monaco meurt en 1795
et les amants décidèrent de se marier trois ans plus tard, en exil
en Angleterre avec la Révolution Française. Le lieu devint déjà
une résidence d'ambassadeur : celui d'Angleterre en 1790, de
l'empire ottoman sous le Directoire, du Portugal sous la Restauration
et de l'empire austro-hongrois durant la Monarchie de Juillet !
Puis c'est un riche milliardaire hollandais qui en fait
l'acquisition, donnant des fêtes somptueuses avant de le vendre au
prince de Sagan. Eux aussi ont donné des bals et des grandes
festivités régulièrement, invitant le Tout-Paris. Et la Pologne
dans tout ça ? Elle ne l'acquiert qu'en 1936 !
C'est sans doute le plus
bel hôtel particulier que j'ai pu visité lors de mes différentes
Journées du Patrimoine. Il est classe, beau, luxueux, on s'imagine
tellement dans ces décors, à ces fêtes du 19e siècle dans des
robes à tournures (oui je m'imagine toujours en costumes dans des
lieux historiques) ou Belle Époque. Je vous conseille vraiment cette
visite si vous êtes à Paris l'an prochain, il est souvent ouvert
seulement le samedi, mais ça vaut vraiment le coup !
L'hôtel de Besenval – Ambassade de Suisse
Juste à côté, il
suffit de faire quelques mètres, se tient un autre hôtel
particulier pour une autre ambassade : celle de Suisse. Au
départ destiné pour l'abbé Pierre-Chanac de Pompadour, son
plus grand occupant fut Pierre-Victor de
Besenval, qui l'acquis en 1767. La brochure caractérise
l'homme comme un « gentilhomme galant, épris de liberté »
et quand on sait qu'il avait fait construire au sous-sol un nymphée,
avec un grand bassin et de beaux décors, on comprend un peu le
bonhomme ! Ayant eu la décence de ne pas se marier, il lègue
tous les biens à son meilleur ami, le maréchal de Ségur. Puis
encore une fois, la Révolution passe par là et après, divers
occupants viennent vivre ici, comme des Bonaparte sous le Second
Empire. Quant à la Suisse, l'ambassade s'y installe en 1938.
C'est un endroit
adorable. Le seul souçi, c'est qu'on ne pouvait pas prendre de
photos, et c'est bien dommage car il y a un petit boudoir 18e siècle
absolument somptueux, un salon dit « des perroquets » car
il y en a partout en peinture ou en porcelaine. Quant à la salle à
manger, j'adore ce vert très apaisant, chic et sobre … On ne
visite que le rez-de-chaussée, mais les suisses savent accueillir
car on repart avec un morceau de chocolat ♥
Ambassade de Finlande
Là encore pas de
photographies, car après étonnement, l'ambassade n'est pas un hôtel
particulier mais un immeuble moderne. L'intérieur est tellement
scandinave, avec son design moderne et son décor sobre. Nous avons
surtout lorgné sur les ouvrages en français et bu un jus infusé
aux fruits. On nous a vendu aussi l'institut finlandais pour assister
à des conférences mais aussi aller manger au café. Le type a eu un
raisonnement simple : visiter l'ambassade, manger à l'institut,
partir en Finlande. Leur gentillesse et leur petit jeu concours
(consistant à tirer un papier pour gagner un petit lot) me rappelle
mes vacances à Stockholm et Copenhague, ce qui m'a donnée envie de
repartir en Scandinavie dés que je le pourrais.
La journée s'est
terminée avec une loge maçonnique dans le 13e
arrondissement. J'en parlerais rapidement car arrivé tard, nous
n'avons pas visité ni vraiment lu les présentations, juste assisté
à une conférence de présentation de la franc-maçonnerie.
Intéressant mais frustrant puisqu'ils ne peuvent pas dire
grand-chose car voué au secret. Et puis, on était tous les trois
crevés après notre grosse journée, ça ira mieux dimanche !
Le dimanche est bien plus
tranquille avec seulement deux visites au programme, et après une
bonne nuit de sommeil ! Direction le 16e arrondissement pour
visiter une ambassade surprenante : celle d'Afghanistan.
Ambassade
d'Afghanistan
Pour la première fois,
l'ambassade afghane ouvre ses portes au public grâce au nouvel
ambassadeur nommé en juillet, Abdel-Ellah
Sediqi. Profondément francophile, il a aussi l'ambition
de montrer le nouveau visage de l'Afghanistan. Après tout, beaucoup
ont découvert ce pays avec les attentats du 11 septembre 2001 et les
talibans, pas forcément la meilleure image !
Dans ce bel hôtel
particulier de la fin du 19e siècle, on peut visiter au
rez-de-chaussé quelques salons de réception, avec des informations
sur l'histoire du pays, mais aussi sur les derniers chiffres sur
l'avancée du droit des femmes. On nous montre des chiffres de 2001 à
l'époque des Talibans, et 2015. Autant dire que les chiffres parlent
d'eux mêmes. En même temps, ils partaient un peu de zéro, autant
au niveau éducation que politique. En 2015, 25% de l'assemblée
nationale afghane étaient des femmes (soit 62 sur 249) et il y a
même une vice-présidente, Fawzia Koofi.
En 15 ans ! En France, et merci la loi sur la parité, 26,9%
sont des femmes à l'Assemblée Nationale, soit 155 sur 577.
J'ai un peu mal à ma République …
Au
premier étage se trouvait l'ambassadeur en personne ! Il était
très content de voir du monde se déplacer à l'ambassade et on
pouvait même lui poser quelques questions. Ça fait plaisir de voir
des personnes motivées pour leur pays de la sorte ! La visite
était très agréable et intéressante, et j'étais surprise de voir
des gens se déplacer au bout du 16e arrondissement pour jouer les
curieux !
Domaine National de Saint-Cloud
Tout autre monde
maintenant avec le domaine national de Saint-Cloud. Avant était
érigé un château qui est passé entre les mains de plusieurs
propriétaires comme Henri III, ou la famille de Gondi. En
1659, la demeure est achetée par Philippe
d'Orléans, dit Monsieur, frère de Louis XIV,
et il est sans doute celui qui créa la beauté de ce qu'il appelait
sa « délicieuse maison ». Il acheta tous les
terrains aux alentours, passant de 12 à 590 hectares, fit aménager
le jardin par André Le Nôtre,
se dote d'une Galerie d'Apollon (bien avant la Galerie des Glaces) et
de la Grande Cascade par Antoine Le Pautre (qui a coûté
environ 1.000.000 de livres), encore conservée aujourd'hui. Il est
transmis dans la famille d'Orléans jusqu'en 1784 où Louis
XVI l'achète pour la reine Marie
Antoinette. Il échappe aux destructions de la Révolution
et c'est ici que le coup d'état du 18 brumaire de Napoléon Bonaparte est fait. Napoléon III
et son épouse Eugénie adore
cette demeure aussi. En 1870, le château est bombardé et
incendié, on a juste le temps de sauver les quelques meubles et
certaines peintures avant de laisser place aux ruines, détruites à
leur tour en 1892.
Aujourd'hui, il ne reste
que les jardins, le parc et cette magnifique fontaine, rarement mise
en haut à cause de l'ancienneté des canalisations et la fragilité
de la construction. Lors des Journées du Patrimoine, ils sont mis en
route, et c'est toujours un spectacle grandiose. Puis les jardins
sont très apaisants, on se croirait à la campagne alors qu'on est à
côté d'une autoroute …
J'adore cet endroit. Pour
commencer, je suis une grande fan de Monsieur,
j'aime ce personnage haut en couleurs, homosexuel affirmé avec ses
favoris et ses mignons, à cheval sur l'étiquette, et qui a était
le premier de la dynastie Bourbons-Orléans, aujourd'hui chef de la
Maison de France (contrairement aux Bourbons de France qui
n'existent plus depuis la mort du Comte de Chambord. Descendance par
les hommes j'entends bien, et je ne compte pas la branche espagnole).
Sa vie est une tragi-comédie avec des déboires mais aussi du faste
et perpétuellement l'ombre son frère … Il reste quelques traces
du château dans le petit musée à l'entrée du domaine,
intéressant, surtout la maquette de ce qu'était le château. Je
vous conseille vraiment d'y aller, au moins pour la promenade.
Voilà pour ces Journées
du Patrimoine denses et intéressantes comme chaque année !
J'aime vraiment cet événement qui permet d'ouvrir les portes de
lieux où le commun des mortels ne peut entrer en temps normal. Et
vous, avez-vous fait les Journées du Patrimoine ?
Des visites très intéressantes et inédites au coeur du pouvoir, comme on dit ;)
RépondreSupprimerPour ma part, pas de JEP cette année, j'étais dans le Pas-de-Calais à admirer la mer et la nature. Pas mal aussi !
La mer et la nature, c'est très bien aussi
SupprimerLa patience d'attendre, justement, je ne l'ai pas du tout ! Quelqu'un veut que je fasse l'Élysée avec, mais je ne crois pas avoir la force... Je vous admire vraiment ! Par contre, vous avez dû bien apprécier vos visites :-))
RépondreSupprimerJe ne le referais pas, je l'avoue ! Et l'attente gâche un peu la beauté du décor, mais je peux dire que je l'ai fait :)
SupprimerTrès beau programme et de magnifiques photos, qui font voyager de manière interposée ! ^^ Personnellement, ça fait plusieurs années que je ne fais plus rien pour les JEP pour la simple et bonne raison que je travaille..donc moi je suis de l'autre côté et j'accueille les visiteurs mais j'aimais bien, avant, pouvoir visiter des lieux un peu hors du commun et qui ne sont ouverts qu'à ce moment-là. C'est sympa de se voir ouvrir des portes qui habituellement sont fermées. Tes visites d'ambassade avaient l'air bien sympas en tous cas.
RépondreSupprimerJ'adore faire les visites d'ambassades, souvent elles sont dans des hôtels particuliers somptueux !
SupprimerMais ça doit sympa aussi d'être du côté accueil, on doit croiser des publics différents.
C'est une super idée les journées du patrimoine mais le monde dans certains endroits peut vite décourager parfois.
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