dimanche 29 novembre 2015

Château de Maisons : une demeure classique et somptueuse



Me revoilà … Je m'excuse de ma longue absence (même si je ne suis pas une blogueuse des plus connues) mais entre la fatigue, un job prenant et les événements de ces derniers jours, je n'avais pas le cœur à raconter mes péripéties. Mais comme il faut savoir se relever et se motiver, je reviens parmi vous et je commence par une visite d'il y a un mois, dans un superbe château assez méconnu et pourtant à visiter, celui de Maisons, à Maisons-Laffitte. Je vous fais la visite, suivez moi …

Petit historique du château



« Il n'est point d'étranger qui ne l'aille voir » disait Charles Perrault sur cette magnifique demeure. Une architecture XVIIe pensé par l'architecte François Mansart en 1636 pour le président du Parlement de Paris, René de Longueil. Ce dernier a les moyens de payer les lieux car il devient aussi gouverneur des châteaux de Versailles – encore le petit relais de chasse de Louis XIII - et de Saint Germain, où vit la Cour une partie de l'année. Un monsieur important, ce Longueil, il lui faut donc un château à sa mesure. Une construction rapide, puisqu'elle est achevée en 1651 et une fête d'inauguration est donnée, en l'honneur de la famille royale, avec le jeune roi Louis XIV, la régente Anne d'Autriche, et le prince Philippe d'Anjou.

Pourtant, durant plusieurs années, Longueil se retranche à Maisons, après qu'on lui ait retiré ses charges et condamné à l'exil. Le bougre en profite pour racheter les terres alentours histoire de gagner un peu sa croûte. Son retour en grâce en 1658 donne lieu à des visites du jeune roi au château lors de parties de chasse, alors qu'il séjourne à Saint-Germain non loin de là. Ce n'est qu'en juillet 1671, de retour des Flandres, que Louis XIV, accompagné de la reine Marie-Thérèse d'Autriche, et son frère Monsieur, rejoints par la fille de ce dernier Marie-Louise d'Orléans, que la famille royale dormira sur place avant de reprendre la route pour Versailles.



Le petit-fils de René de Longueil, Jean-René, recevait régulièrement les philosophes et scientifiques du XVIIIe siècle. Parmi eux, Voltaire, ami du propriétaire et où il venait écrire l'Henriade, y tomba gravement malade en 1723, atteint de la petite vérole. Il fut soigné et évidemment toujours sympathique, laissa au maître de maison le soin de payer les factures. Pas de chance, à force de chauffer la chambre pendant plusieurs semaines, celle-ci déclara un incendie qui dévasta une partie du château. Avec le coût des travaux, Maisons resta dans un mauvais état durant de nombreuses années. Louis XV pensa par deux fois à racheter Maisons, pour ses maîtresses la marquise de Pompadour (qui préfèrera Bellevue, aujourd'hui détruit) puis madame du Barry, mais les deux projets furent avortés à cause du coût des travaux.



La propriété resta dans la famille de Longueil, par descendance féminine, jusqu'en 1777. Enfin un acquéreur se proposa et ce n'est pas n'importe qui : Charles d'Artois, petit frère du roi Louis XVI, futur Charles X. Ce dernier cherchait une propriété non loin de Saint-Germain, durant les travaux du château Neuf (aujourd'hui disparu, il ne reste que le château Vieux), mais entreprend aussi des rénovations à Maisons, pour le remettre à neuf et aussi au goût du jour, notamment dans la décoration et confit les travaux à l'architecte Joseph Bellanger, mais les travaux s'arrêtent en 1784, faute d'argent, c'est bête. Vient ensuite la Révolution Française en 1789 et le comte d'Artois, homme courageux et fidèle à son frère, se barre en exil, devenant un émigré comme la plupart de la noblesse française. Le château est alors placé sous scellés, les meubles sont vendus et le château se délabre.

Portrait de Charles d'Artois, 18e siècle
Fort heureusement, en 1804, un nouvel acheteur se propose : Jean Lannes, maréchal d'Empire, termine les travaux et enfin, le château retrouve sa splendeur perdu depuis un siècle. Mais ce dernier ne profite guère de sa nouvelle demeure puisqu'il décède le 31 mai 1809, des suites de blessures après la bataille d'Essling contre l'empire d'Autriche. Sa jeune veuve, Louise de Guéhéneuc, revend à son tour au banquier Jacques Laffitte. Mais suite à retour de fortune, le banquier dut vendre une partie des jardins pour en faire lotissements en 1833, et fit raser les écuries.

Plusieurs autres acheteurs se succédèrent durant la fin du XIXe siècle, et l’État l'acquiert enfin en 1905, pour sauver ce modèle d'architecture mais aussi très riche en histoire, bien qu'il ne soit pas un château royal et fut classé Monument Historique en 1914. Cela fait plus d'un siècle qu'il est ouvert au public.

La visite


Lorsqu'on arrive dans la rue menant au château, avec de jolis pavillons de chaque côté, le contraste est tout de même saisissant avec cette architecture du Grand Siècle, symétrique et tout de même imposant malgré la taille modeste de l'endroit, avec ces colonnes et ses chapiteaux. Il ne manquait que nos jolies robes et chapeaux, tout serait parfait. Il était amusant de voir le jardin couvert de diverses sculptures, je n'en ai pas trouvé l'explication mais tout ce bric-à-brac posé là donnait une belle atmosphère aux lieux. Nous étions fin octobre, une belle journée ensoleillée, un parfait moment pour une visite, cela va sans dire !




Enfin entrées, le rez de chaussée se compose en trois parties bien distinctes : au centre le vestibule, à gauche les appartements de Longueil et à droit ceux du comte d'Artois. Nous commençons donc la visite sur la gauche, avec quatre pièces de l'appartement XVIIe, avec notamment un magnifique salon redécoré à la mode XVIIIe, le cabinet de travail du parlementaire et ancien surintendant des finances, mais aussi sa chambre, appelé aussi salon des captifs, en rapport avec la décoration de la cheminée, où les captifs sont les provinces gagnées par le souverain Louis XIII, au centre du médaillon avec le couronne de lauriers. Très modeste tout ça, non ?






On passe ensuite par la partie centrale, où l'on entrait à l'époque. Autant dire que ça en jette ! Avec ses colonnes, les initiales de René de Longueil (LO) et son épouse, Madeleine Boulenc de Crèvecœur (MB), avec leurs emblèmes, l'épi de blé, le lierre et le laurier. Pour le petit amusement, les aigles sont un clin d’œil pour le jeu de mots… un « long-oeil », qui a dit qu'on n'avait pas d'humour à l'époque. Au-dessus des portes, les quatre éléments sont représentés, sculptés par Gilles Guérin.

Mais un vestibule ne serait pas grand chose sans un magnifique escalier d'honneur, d'une architecture à la mode dans le Paris de 1640, tournant autour d'un large jour central, les quatre volées sont dites « suspendues », et les corniches décorées de petits amours représentent la musique et le chant, les sciences et les arts plastiques, la paix et l'art militaire, l'amour et l'hymen. Mais nous ne le montrons que tout à l'heure pour découvrir l'étage …




Enfin, à droite du bâtiment, les appartements du comte d'Artois se révèlent et montrent bien la modestie du personnage, dans un style néoclassique. L'exemple le plus flagrant reste la salle à manger, avec tout un ornement de colonnes et de statues sur le thème des quatre saisons. L'endroit est absolument grandiose et l'on imagine aisément des tables posées pour un souper en grande pompe ! Les autres salles ont été remaniées avec le temps, l'ancienne salle à manger des officiers du comte est devenue une salle de jeux. Ces quatre pièces marquent la fin du rez de chaussée, mais avant de grimper à l'étage, nous préférons descendre dans les sous sols …





Mais que peut-il bien y avoir au sous-sol ? Le château a récemment fait des fouilles archéologiques pour y découvrir une chambre des bains, avec un escalier menant directement aux appartements de René de Longueil et du roi. L'eau était chauffée par un fourneau et après la baignade, on disposait de siège et d'un lit près de la cheminée pour y prendre une collation.

Quand nous sommes venues, le château organisait une exposition sur "La vie quotidienne sous Louis XIV" pour découvrir comment on vivait à l'époque, sur les métiers exercés et leurs vies de tous les jours. Il était très intéressant de voir les outils utilisés et voir à quel point certains corps de métiers se trouvaient bien en avance sur leur temps.





Montons enfin ce bel escaliers pour accéder à l'étage, divisé en deux parties bien distinctes mais aussi belles l'une que l'autre.

Commençons par l'appartement du roi, dit appartement à l'italienne, est celui qui est gardé presque toute sa décoration d'origine avec son berceau et ses fausses voûtes. La première pièce est une salle de bal, avec une tribune surmontée pour les musiciens. Les murs sont recouverts de boiseries et ornés de six toiles de paysages italiens, par Jean Victor Bertin et Jean Joseph Bidauld. La salle ouvre au fond sur l'antichambre appelé le salon d'Hercule. Dans cette pièce semi-ouverte, on retrouve une imposante cheminée où se trouve le portrait de Louis XIV peint par Hyacinthe Rigaud, pas le plus flatteur à mon sens, mais bref. Quant à la chambre, on peut deviner l'importance du propriétaire quand celui-ci crée une chambre spécialement pour son roi, même si le souverain ne vient dormir qu'une nuit. Construite comme une salle de spectacles avec un plafond à coupoles et un parquet à compartiments, sans parler du lit d'apparat, on y voit tout le raffinement et le confort, puisque des latrines sont présentes. Si vous me parlez des costumes présents, je pense que le personnel commençait à monter le nouvelle exposition « De profundis,costumes de deuil à la Cour de France » (à voir jusqu'au 25 janvier). L'appartement se dote aussi d'un grand cabinet surmonté d'une couple et d'un cabinet aux miroirs, une pièce circulaire ornée de glaces séparées par des pilastres ioniques, qui reflètent la lumière du jour venant d'une seule fenêtre, et surplombée d'une superbe coupole décorée.



 


On termine le château avec les appartements du Maréchal Lannes, dans un style Empire qui tranche avec le reste du château, même si du mobilier plus tardif, comme une table de jeux d'époque Restauration vient s'incruster. Dans le couloir, on retrouve des objets et des gravures et la famille Lannes, des objets personnels témoignant de leur passage entre ces murs. Dans ces appartements, deux chambre se côtoient : celle de l'épouse, devenue par la suite la chambre de Jacques Laffitte, dans un décor rouge, et la chambre du Maréchal où c'est surtout son épouse Louise de Guéhéneuc, qui y dormit. Cette dernière reçut plusieurs fois l'empereur Napoléon 1e et sa seconde épouse l'impératrice Marie-Louise, dont elle était la dame d'honneur en ces murs.






Mon avis


L'avantage de visiter un lieu peu connu est bien sûr l'espace qu'on a, la tranquillité de ses mouvements et surtout un calme, parfait pour imaginer la vie quotidienne au fil des pas. Être toutes les trois seules dans certaines pièces, un luxe dans certains châteaux, donnaient un caractère particulier à la visite, particulièrement dans l'appartement de la Renommée, à chercher quelle sculpture représentait quelle saison, ou dans la salle de bal où on peut aisément s'imaginer sous Louis XIV, quand le roi venait chasser ici. Un petit bijou qu'il faut faire connaître. D'ailleurs, avis aux amateurs, la série Versailles, actuellement sur Canal +, a tourné certaines séquences à Maisons, j'y ai repéré l'escalier et le vestibule par exemple !

Je vous conseille de vous y rendre, vous retrouverez toutes les informations sur le site http://maisons.monuments-nationaux.fr/fr/




N'hésitez pas à donner votre avis si vous l'avez déjà visité, ou si vous avez des châteaux à découvrir, notamment en Île de France ( :

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