Me revoilà … Je
m'excuse de ma longue absence (même si je ne suis pas une blogueuse
des plus connues) mais entre la fatigue, un job prenant et les
événements de ces derniers jours, je n'avais pas le cœur à
raconter mes péripéties. Mais comme il faut savoir se relever et se
motiver, je reviens parmi vous et je commence par une visite d'il y a
un mois, dans un superbe château assez méconnu et pourtant à
visiter, celui de Maisons, à Maisons-Laffitte. Je vous fais la
visite, suivez moi …
Petit historique du château
« Il n'est point
d'étranger qui ne l'aille voir » disait Charles
Perrault sur cette magnifique demeure. Une architecture XVIIe
pensé par l'architecte François Mansart
en 1636 pour le président du Parlement de Paris, René
de Longueil. Ce dernier a les moyens de payer les lieux
car il devient aussi gouverneur des châteaux de Versailles –
encore le petit relais de chasse de Louis XIII - et de Saint
Germain, où vit la Cour une partie de l'année. Un monsieur
important, ce Longueil, il lui faut donc un château à sa
mesure. Une construction rapide, puisqu'elle est achevée en 1651
et une fête d'inauguration est donnée, en l'honneur de la famille
royale, avec le jeune roi Louis XIV,
la régente Anne d'Autriche, et
le prince Philippe d'Anjou.
Pourtant, durant
plusieurs années, Longueil se retranche à Maisons, après
qu'on lui ait retiré ses charges et condamné à l'exil. Le bougre
en profite pour racheter les terres alentours histoire de gagner un
peu sa croûte. Son retour en grâce en 1658 donne lieu à des
visites du jeune roi au château lors de parties de chasse, alors
qu'il séjourne à Saint-Germain non loin de là. Ce n'est
qu'en juillet 1671, de retour des
Flandres, que Louis XIV,
accompagné de la reine Marie-Thérèse
d'Autriche, et son frère Monsieur,
rejoints par la fille de ce dernier Marie-Louise
d'Orléans, que la famille royale dormira sur place avant
de reprendre la route pour Versailles.
Le petit-fils de René
de Longueil, Jean-René,
recevait régulièrement les philosophes et scientifiques du XVIIIe
siècle. Parmi eux, Voltaire, ami
du propriétaire et où il venait écrire l'Henriade, y tomba
gravement malade en 1723, atteint de la petite vérole. Il fut
soigné et évidemment toujours sympathique, laissa au maître de
maison le soin de payer les factures. Pas de chance, à force de
chauffer la chambre pendant plusieurs semaines, celle-ci déclara un
incendie qui dévasta une partie du château. Avec le coût des
travaux, Maisons resta dans un mauvais état durant de nombreuses
années. Louis XV pensa par deux
fois à racheter Maisons, pour ses maîtresses la marquise de
Pompadour (qui préfèrera Bellevue, aujourd'hui détruit) puis
madame du Barry, mais les deux projets furent avortés à
cause du coût des travaux.
La propriété resta dans
la famille de Longueil, par descendance féminine, jusqu'en 1777.
Enfin un acquéreur se proposa et ce n'est pas n'importe qui :
Charles d'Artois, petit frère du
roi Louis XVI, futur Charles X. Ce dernier cherchait
une propriété non loin de Saint-Germain, durant les travaux du
château Neuf (aujourd'hui disparu, il ne reste que le château
Vieux), mais entreprend aussi des rénovations à Maisons, pour le
remettre à neuf et aussi au goût du jour, notamment dans la
décoration et confit les travaux à l'architecte Joseph
Bellanger, mais les travaux s'arrêtent en 1784, faute
d'argent, c'est bête. Vient ensuite la Révolution Française en
1789 et le comte d'Artois,
homme courageux et fidèle à son frère, se barre en exil, devenant
un émigré comme la plupart de la noblesse française. Le château
est alors placé sous scellés, les meubles sont vendus et le château
se délabre.
![]() |
Portrait de Charles d'Artois, 18e siècle |
Fort heureusement, en
1804, un nouvel acheteur se propose : Jean
Lannes, maréchal d'Empire, termine les travaux et enfin,
le château retrouve sa splendeur perdu depuis un siècle. Mais ce
dernier ne profite guère de sa nouvelle demeure puisqu'il décède
le 31 mai 1809, des suites de blessures après la bataille
d'Essling contre l'empire d'Autriche. Sa jeune veuve, Louise de
Guéhéneuc, revend à son tour au banquier
Jacques Laffitte. Mais suite à retour de fortune, le
banquier dut vendre une partie des jardins pour en faire lotissements
en 1833, et fit raser les écuries.
Plusieurs autres
acheteurs se succédèrent durant la fin du XIXe siècle, et l’État
l'acquiert enfin en 1905, pour
sauver ce modèle d'architecture mais aussi très riche en histoire,
bien qu'il ne soit pas un château royal et fut classé Monument
Historique en 1914. Cela fait plus d'un siècle qu'il est
ouvert au public.
La visite
Lorsqu'on arrive dans la
rue menant au château, avec de jolis pavillons de chaque côté, le
contraste est tout de même saisissant avec cette architecture du
Grand Siècle, symétrique et tout de même imposant malgré
la taille modeste de l'endroit, avec ces colonnes et ses chapiteaux.
Il ne manquait que nos jolies robes et chapeaux, tout serait parfait.
Il était amusant de voir le jardin couvert de diverses sculptures,
je n'en ai pas trouvé l'explication mais tout ce bric-à-brac posé
là donnait une belle atmosphère aux lieux. Nous étions fin
octobre, une belle journée ensoleillée, un parfait moment pour une
visite, cela va sans dire !
Enfin entrées, le rez
de chaussée se compose en trois parties bien distinctes : au
centre le vestibule, à gauche les appartements de Longueil
et à droit ceux du comte d'Artois. Nous commençons donc
la visite sur la gauche, avec quatre pièces de l'appartement XVIIe,
avec notamment un magnifique salon redécoré à la mode XVIIIe, le
cabinet de travail du parlementaire et ancien surintendant des
finances, mais aussi sa chambre, appelé aussi salon des captifs, en
rapport avec la décoration de la cheminée, où les captifs sont les
provinces gagnées par le souverain Louis XIII, au centre du
médaillon avec le couronne de lauriers. Très modeste tout ça,
non ?
On passe ensuite par la
partie centrale, où l'on entrait à l'époque. Autant dire que ça
en jette ! Avec ses colonnes, les initiales de René
de Longueil (LO) et son épouse, Madeleine Boulenc de
Crèvecœur (MB), avec leurs emblèmes, l'épi de blé, le lierre
et le laurier. Pour le petit amusement, les aigles sont un clin d’œil
pour le jeu de mots… un « long-oeil », qui a dit
qu'on n'avait pas d'humour à l'époque. Au-dessus des portes, les
quatre éléments sont représentés, sculptés par Gilles Guérin.
Mais un vestibule ne
serait pas grand chose sans un magnifique escalier d'honneur, d'une
architecture à la mode dans le Paris de 1640, tournant autour d'un
large jour central, les quatre volées sont dites « suspendues »,
et les corniches décorées de petits amours représentent la
musique et le chant, les sciences et les arts plastiques, la paix et
l'art militaire, l'amour et l'hymen. Mais nous ne le montrons que
tout à l'heure pour découvrir l'étage …
Enfin, à droite du
bâtiment, les appartements du comte
d'Artois se révèlent et montrent bien la modestie du
personnage, dans un style néoclassique. L'exemple le plus flagrant
reste la salle à manger, avec tout un ornement de colonnes et de
statues sur le thème des quatre saisons. L'endroit est absolument
grandiose et l'on imagine aisément des tables posées pour un souper
en grande pompe ! Les autres salles ont été remaniées avec le
temps, l'ancienne salle à manger des officiers du comte est devenue
une salle de jeux. Ces quatre pièces marquent la fin du rez de
chaussée, mais avant de grimper à l'étage, nous préférons
descendre dans les sous sols …
Mais que peut-il bien y
avoir au sous-sol ? Le château a récemment fait des fouilles
archéologiques pour y découvrir une chambre des bains, avec un
escalier menant directement aux appartements de René
de Longueil et du roi. L'eau était chauffée par un
fourneau et après la baignade, on disposait de siège et d'un lit
près de la cheminée pour y prendre une collation.
Quand nous sommes venues,
le château organisait une exposition sur "La vie quotidienne
sous Louis XIV" pour découvrir comment on vivait à
l'époque, sur les métiers exercés et leurs vies de tous les jours.
Il était très intéressant de voir les outils utilisés et voir à
quel point certains corps de métiers se trouvaient bien en avance
sur leur temps.
Montons enfin ce bel
escaliers pour accéder à l'étage, divisé en deux parties bien
distinctes mais aussi belles l'une que l'autre.
Commençons par
l'appartement du roi, dit appartement à l'italienne, est celui qui
est gardé presque toute sa décoration d'origine avec son berceau et
ses fausses voûtes. La première pièce est une salle de bal, avec
une tribune surmontée pour les musiciens. Les murs sont recouverts
de boiseries et ornés de six toiles de paysages italiens, par Jean
Victor Bertin et Jean Joseph Bidauld. La salle ouvre au
fond sur l'antichambre appelé le salon d'Hercule. Dans cette pièce
semi-ouverte, on retrouve une imposante cheminée où se trouve le
portrait de Louis XIV peint par
Hyacinthe Rigaud, pas le plus flatteur à mon sens, mais bref.
Quant à la chambre, on peut deviner l'importance du propriétaire
quand celui-ci crée une chambre spécialement pour son roi, même si
le souverain ne vient dormir qu'une nuit. Construite comme une salle
de spectacles avec un plafond à coupoles et un parquet à
compartiments, sans parler du lit d'apparat, on y voit tout le
raffinement et le confort, puisque des latrines sont présentes. Si
vous me parlez des costumes présents, je pense que le personnel
commençait à monter le nouvelle exposition « De profundis,costumes de deuil à la Cour de France » (à voir jusqu'au
25 janvier). L'appartement se dote aussi d'un grand cabinet
surmonté d'une couple et d'un cabinet aux miroirs, une pièce
circulaire ornée de glaces séparées par des pilastres ioniques,
qui reflètent la lumière du jour venant d'une seule fenêtre, et
surplombée d'une superbe coupole décorée.
On termine le château
avec les appartements du Maréchal Lannes,
dans un style Empire qui tranche avec le reste du château, même si
du mobilier plus tardif, comme une table de jeux d'époque
Restauration vient s'incruster. Dans le couloir, on retrouve des
objets et des gravures et la famille Lannes, des objets personnels
témoignant de leur passage entre ces murs. Dans ces appartements,
deux chambre se côtoient : celle de l'épouse, devenue par la
suite la chambre de Jacques Laffitte,
dans un décor rouge, et la chambre du Maréchal où c'est surtout
son épouse Louise de Guéhéneuc,
qui y dormit. Cette dernière reçut plusieurs fois l'empereur
Napoléon 1e et sa
seconde épouse l'impératrice Marie-Louise,
dont elle était la dame d'honneur en ces murs.
Mon avis
L'avantage de visiter un
lieu peu connu est bien sûr l'espace qu'on a, la tranquillité de
ses mouvements et surtout un calme, parfait pour imaginer la vie
quotidienne au fil des pas. Être toutes les trois seules dans
certaines pièces, un luxe dans certains châteaux, donnaient un
caractère particulier à la visite, particulièrement dans
l'appartement de la Renommée, à chercher quelle sculpture
représentait quelle saison, ou dans la salle de bal où on peut
aisément s'imaginer sous Louis XIV, quand le roi venait chasser ici.
Un petit bijou qu'il faut faire connaître. D'ailleurs, avis aux
amateurs, la série Versailles, actuellement sur Canal +, a tourné
certaines séquences à Maisons, j'y ai repéré l'escalier et le
vestibule par exemple !
Je vous conseille de vous
y rendre, vous retrouverez toutes les informations sur le site
http://maisons.monuments-nationaux.fr/fr/
N'hésitez pas à donner
votre avis si vous l'avez déjà visité, ou si vous avez des
châteaux à découvrir, notamment en Île de France ( :
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