Je n'ai jamais écrit
sur l'Antiquité ici. Pas parce que je n'aime pas cette période,
juste que je n'ai jamais eu l'occasion. Et comme je disais la
dernière fois que je n'avais aucune mort à mettre en article, en
voici une du plus grand connu des romains : Jules César.
Dictateur, homme de guerre, adulé puis haï, trahi par les siens, sa
mort est digne des grandes tragédies latines de Sénèque. Direction
le cœur de l'empire romain : Rome, au Sénat précisément.
Comme à toutes époques,
les hommes poussent un de leur semblable au sommet, avant de le faire
chuter. Particulièrement vrai durant l'empire romain, où les chefs
se succédèrent à grande vitesse au fil des assassinats. Jules
César essaye d'apporter un peu de stabilité à la République.
Adoré, adulé et même divinisé, le voici au-dessus de tous, sans
se douter qu'un complot se prépare.
En cette journée du 15
mars, durant les ides, fêtes mettant à l'honneur le dieu de la
guerre Mars, Jules César se rend au Sénat. Mais son épouse
Calpurnia Pisonis tente de l'en empêcher. En effet, elle a rêvé
qu'il se faisait poignarder. Quel rêve sympathique. Mais elle n'est
pas la seule, le devin étrusque Spirunna l'avait averti aussi
quelques jours auparavant, de se méfier des ides de mars. Mais
Decimus Brutus, un proche de César, vint le quérir chez lui, vers
11 heures du matin. Ne voulant pas que le Sénat pense qu'il les
méprise, le dictateur part en en litière par la via Sacra pour
assister au conseil.
Il y a tellement de
solliciteurs que César ne lit pas la missive d'Artémidoros, un de
ses informateurs, qui a eu vent de la conspiration et veut en
informer au plus vite le dictateur. Et en gravant les marches de la
Curie, il croise l'augure Spurinna et l'interpelle :
« Eh bien, les ides
de mars sont là.
Oui elles sont là, mais
elle ne sont pas passées. »
Et pendant qu'il pénètre
dans le Sénat, son consul, Marc-Antoine, est retenu dehors par un
sénateur, Caius Trebonius. Il faut l'épargner, seulement tuer
César. Car oui, l'assassinat est prémédité, et par une
soixantaine de personnes ! Si le Sénat a nommé son chef
dictateur à vie, il n'y a pas unanimité : certains pensent que
l'imperator veut se faire couronner roi, et remettre sur les rails la
monarchie ! Il faut donc l'en empêcher avant. Et ce Caius
Trebonius, avait demandé à Marc-Antoine de rejoindre le complot, ce
dernier refusa mais ne prit pas la peine d'en avertir César.
La mort de César, Vincenzo Camuccini |
Pendant ce temps, le
dictateur s'assit et les conseillers l'entourèrent, sous prétexte
de lui rendre hommage. L'un d'eux, Tillius Cimber, s'approcha, comme
pour demander une faveur. Et alors que César le renvoyait, un autre
le frappa en-dessous de la gorge. César cherche à se dégager mais
une autre blessure l'affaiblit. Puis il se rendit compte que
l'hommage supposé relevait plutôt d'un crime collectif puisque tous
brandissaient des poignards. S'enroulant dans sa toge comme pour se
protéger, il fut transpercer de vingt trois coups de poignards. Sans
doute est-ce la, quand il vit son fils Marcus Brutus parmi les
traîtres lui dire « Toi aussi, mon fils. » Puis il tomba
au pied de la statue de Pompée, blessé à mort. Courageux, les
assassins coururent au dehors, de même que d'autres sénateurs,
stupéfait par ce crime atroce. Personne n'approcha le corps sans vie
du grand homme pendant plusieurs heures. Puis enfin, trois esclaves
l'installèrent dans une litière pour le ramener chez lui.
Estampe de Jules César, sur Gallica |
Assassinat réussi ?
Pas tout à fait. Les conjurés avaient décidé de jeter le corps
dans le Tibre – fleuve de Rome – et de lui confisquer ses biens.
Sauf que leur fuite avait donné l'occasion à César de briller
encore, jusque dans la mort. Le peuple adorait César et le consul
Marc-Antoine prépara de sublimes funérailles. Le lit funèbre, en
ivoire et tentures d'or, du grand chef de guerre sur le forum, devant
la tribune des magistrats. Tous se disputèrent : où brûler
son corps ? Dans le sanctuaire de Jupiter ou dans la Curie de
Pompée ? Le problème fut réglé quand deux hommes mirent le
feu directement sur le forum. S'en suivit d'un élan populaire, où
tout le monde apporta sa contribution, par le bois des tribunes, les
musiciens du cortège jetèrent leurs vêtements, certains leurs
armes, des couronnes de lauriers et les femmes lancèrent leurs
parures. Quant aux Juifs, ils le pleurèrent plusieurs nuits.
Voilà l'étrange fin
d'un grand homme de guerre, pas toujours parfait, mais qui a eu le
défaut de ne pas faire taire l’idolâtrie du Sénat à son
encontre, au point de proposer un couronnement plusieurs fois, ce
qu'il refusa. Si les conjurés pensèrent sauver la République, ils
ne firent que l'enliser dans une guerre civile jusqu'en 31 av. JC
avec la victoire d'Octave, petit-neveu et fils adoptif de César.
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