samedi 8 août 2015

Exposition de l'Âge d'or de la peinture à Naples, la beauté italienne


Je suis actuellement en vacances à Montpellier, et le Musée Fabre, le musée des Beaux-Arts de la ville, organisait une magnifique exposition sur la peinture napolitaine au 17e siècle, d'où l'âge d'or. Ni une ni deux, j'accourus jusqu'au musée où, au milieu des dizaines de personnes âgées, je me suis régalée de belles peintures avec clair-obscur. Je vais vous expliquer, suivez moi …

Ce qu'il faut savoir pour commencer, c'est que j'aime beaucoup la peinture, sans avoir forcément toutes les clés de compréhension, le nom des techniques ni connaître tous les courants. Alors je passes des heures à lire les explications, me rappeler mes cours d'histoire de l'art, ou mes recherches, les précédentes visites que j'ai pu faire pour avoir quelques points de repères. Et là, ça tombait bien, l'année dernière, j'avais eu le bonheur de visiter Le Trésor de Naples au musée Maillol l'année dernière, et au printemps Les Bas Fondsdu Baroque  au Petit Palais, alors l'Italie à cette époque et les croyances napolitaines, je les avais en tête. C'est parti pour un petit tour à Naples au 17e siècle !

Le déroulement de l'exposition


L'exposition se découpait en six salles, chaque salle présentait une période et l'avancée des techniques, des inspirations selon les peintres venus à Naples pour apporter son influence venu du reste d'Italie mais du reste de l'Europe comme la France et la Flandre.

Enfin, la première salle présente la cité au 17e siècle, capitale du royaume de Naples appartenant à l'Espagne, et sous la domination du vice-roi. En 1656, la ville comptait environ 500.000 habitants, en faisant une des plus grandes villes d'Europe avec Paris, avant que la peste ne vienne décimer la population qui retombe à 186.000 en 1688. La salle présente des tableaux avec des paysages de Naples à cette époque, montrant qu'il s'agit d'une ville entre deux volcans et la mer. Le plus sympathique dans cette salle est la grande gravure d'Alessandro Baratta au mur, et le musée en a fait une carte interactive où l'on peut zoomer sur des zones de la ville et lorsque l'on appuie sur les monuments, comme le fort St Elmo ou la cathédrale St Janvier, avec un petit historique et une description de l'architecture. Vraiment ludique et interactive.
Alessandro Baratto, vue de Naples, 1629
La seconde salle se concentre sur le tournant de la peinture napolitaine grâce à la venue de Michelangelo Merisi da Caravaggio, dit Le Caravage, un peintre lombard déjà bien connu. Il vient à Naples deux fois : en 1606-7 et 1609-10. Il est l'un des précurseurs du clair-obscur. Pour ceux qui ne savent pas, c'est une technique picturale consistant à mettre en lumière les personnages selon un certain angle, cela permet un certain relief et même du volume. Si la technique existe depuis la Renaissance, c'est Le Caravage qui donne toute sa lumière à la technique, s'opposant au classicisme de Rome et Bologne. S'ajoute à cela un certain naturalisme, c'est à dire des personnages non-idéalisés, de la vie quotidienne, le tout dans un décor sobre, voici la pâte du Caravage et ce qu'il apporte à Naples à son arrivée.
Le Caravage, Saint Jean-Baptiste, 1610
D'autres artistes, tels que Caracciolo ou Vitale, s'inspirent du travail du grand maître et se réapproprient la technique, mais le premier quart du 17e siècle est marqué par le grand peintre, et si le clair-obscur reste le maître mot, on se tourne davantage vers le côté naturaliste du Caravage, décédé sur la route de Rome en 1610. S'il reste le précurseur, retenons un nouveau nom de la suite du courant : Jusepe de Ribera, installé à Naples depuis 1616 …

La troisième salle s'axe donc sur Ribera et son naturalisme. Ce peintre espagnol a peint à Rome avant de venir à Naples, et décide de s'appuyer du travail du Caravage mais d'accentuer le naturalisme, ce qui plaît aux napolitains et surtout aux peintres qui viennent nombreux à son atelier. Le travail se focalise sur le quotidien un peu rustique, le populaire, au travers notamment de la nourriture modeste, comme le jambon ou les tourtes, mais aussi des toilettes assez simples.
Artemisia Gentileschi, Sainte Agathe guérie par Saint Pierre, 1635-37
Les nouvelles influences viennent de l'extérieur, notamment de Rome, où est passé Ribera, et du peintre espagnol Velázquez, de passage à Naples en 1630, ou alors du peintre français Poussin, apportant aussi une touche de classicisme . Cela se sent au travers d'un nouveau genre : des scènes de bataille, mais point de héros ou de grands personnages, ils sont souvent plus réalistes, avec même des scènes en arrière plan. Un des plus importants dans le domaine est Rosa, un élevé de Ribera.

Dans la salle suivante, la quatrième, poursuit son choix sur l'éloignement du Caravage, et l'accentuation de la couleur. Avant cela, les couleurs sont souvent dans les bruns-ocres, assez sombres, d'où le terme de ténébrisme. Là, on change tout et on s'inspire du passé, via le 16e siècle vénitien, comme Véronèse et le Titien, mais aussi une influence flamande à la même période, comme Van Dyck ou Rubens. D'ailleurs, je vous conseille après l'exposition de visiter les collections permanentes car le musée Fabre possède une grande collection de peinture flamande, histoire de voir les influences et les différences. On peut donc voir une explosion de couleurs, des poses plus sensuelles, même des peintres plus classiques ou naturalistes recherchent à séduire et des couleurs plus chatoyantes. C'est le cas du tableau de Stanzione ci-dessous montre une femme coiffée d'un bonnet de lin porté par les marin. On voit pourtant que cette robe a l'air en apparence simple mais est très travaillée avec un gilet brodé, un col en dentelles, d'une grande qualité. On peut se poser la question : est-ce une femme noble en costume de peuple ou femme modeste dans une robe de grande dame ?
Massimo Stanzione, Portrait de femme au coq en costume napolitain, 1635
La technique, si recherchée, traverse le royaume pour se retrouver en Espagne, où Philippe IV d'Espagne reconnaît la qualité du travail. A Madrid, on commande aux peintres napolitains comme Di Lionne ou Falcone des tableaux pour le palais Buen Retiro, lieu où le souverain espagnol aime s'y détendre et se retirer, aujourd'hui démoli.

Dans l'avant-dernière salle, on nous apprend que Naples est une ville superstitieuse et très croyante et lorsque les malheurs s'abattent sur la ville, ils se tournent sur le saint patron de la ville, San Gennaro (saint Janvier). Au fil des siècles, et des malheurs, de nombreux patrons se sont ajoutés au grand patron, pour atteindre 21 saints au total. Il faut au moins cela, quand on est une ville à côté du Vésuve. Justement, ce dernier s'est réveillé en 1631 ! Après ce la, en 1647, les napolitains se révoltent à cause de la mauvaise gestion du vice-roi, créant un gouvernement indépendant pendant plusieurs mois. Sous oublier en 1656, l'épidémie de peste qui s'abat sur la ville, réduisant la ville à moins de sa moitié niveau population. Ambiance.
Israël Silvestre, Éruption du Vésuve
D'ailleurs, Alexandre Dumas disait « Saint Janvier n'aurait pas existé sans Naples et Naples ne pourrait pas exister sans Saint Janvier. » Au moins c'est clair, surtout qu'en 1631, ce fut l’éruption la plus violente que le Vésuve ait connu depuis 79, celle qui a littéralement détruit Pompéi, on peut dire que les napolitains ont eu chaud !

Enfin, la dernière salle montre la fin de l'indépendance napolitaine en matière de la peinture, et se décide enfin de succomber à son tour au mouvement baroque dans les années 1650, bien après les autres villes de la Botte. Mais qu'est-ce que le baroque ? Il s'agit en fait de la continuité logique des choses, puisque la couleur prédomine sur le dessin, avec des jeux de contrastes, de perspective, on joue aussi sur les positions des personnages, leurs expressions et leurs gestes. Tout est exagéré dans un mouvement grandiloquent. Mais Naples est en retard, déjà le baroque s'essouffle dans le reste de l'Europe, il ne reviendra qu'au siècle suivant, sous le nom de style rocaille (ou rococo pour les intimes). La seconde moitié du 17e siècle sera bien plus classique, emporté par la plus grande puissance à cette période, la France …
Francesco Solimena, Portrait de femme, 1705
J'ai beaucoup aimé l'exposition, claire et très bien expliquée par ses explications à chaque salle et la descriptions de certains tableaux majeurs. Elle se termine sur un aperçu de la cathédrale de Naples sous fond de musique cantique, si apaisante. Il faut savoir qu'elle a reçu le label d’intérêt national par le Ministère de la Culture et de la Communication, soulignant l'intérêt de l'exposition. Bravo.

Alors si vous passez par Montpellier avant le 11 octobre 2015, je vous conseille chaudement cette exposition, tout comme le musée en lui-même dont je vous reparlerais dans un prochain article. Si vous l'avez vu, ou vu une des nombreuses expositions consacrées à Naples ces dernières années, n'hésitez pas à m'en parler :)



Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire