Je vais vous parler
d'une balade faite en … novembre. Je ne sais pas si vous vous en
souvenez mais au début de ce mois, il faisait encore doux, avec les
couleurs automnales, un parfait temps pour une sortie. J'aurais pu
choisir un château, un jardin, non j'ai choisi un cimetière. Mais
pas n'importe lequel : le cimetière du Père Lachaise, sans
doute l'un des plus connus au monde. La preuve ? J'y ai
rencontré beaucoup d'américains et plus d'étrangers que de
français ! Mais je les comprends, quel bel endroit reposant,
esthétique et surprenant. Suivez moi, je vous fais une petite visite
…
Quitte à paraître
glauque, j'aime les lieux où reposent les morts. Quand je pars à
l'étranger, notamment d'anciennes monarchies, j'essaie de visiter
les nécropoles comme à Vienne, Berlin ou Copenhague. Je trouve
cette façon de sublimer la mort dans des sculptures d'une grande
beauté (le double sarcophage de Marie-Thérèse d'Autriche me laisse
encore sans voix) absolument éblouissante. En France, j'ai eu
l'occasion de me rendre à la basilique Saint-Denis où reposent les
rois de France, mais aussi à celle de Dreux où la famille d'Orléans
s'unit dans un sommeil éternel. Je suis beaucoup moins cimetières,
mais il faut avouer que celui du Père Lachaise associe bien la mort
au beau.
Petite histoire du cimetière
Durant l'Ancien Régime,
le domaine de Mont-Louis était une belle propriété champêtre de
17 hectares, appartenant aux Jésuites. L'un deux, François d'Aix de
La Chaise, confesseur du roi Louis XIV, y fait édifier une belle
demeure en 1676, entouré de jardins en terrasse, de potagers et
vergers. Il y vivra avec son frère, le comte de La Chaise, jusqu'à
sa mort en 1709.
Le domaine de Mont-Louis sous l'Ancien Régime, pas mal pour un confesseur |
Il faut savoir que depuis
toujours, les cimetières se tenaient à côté de l'église. Si dans
les villages, il n'y en avait qu'une, à Paris cela devenait plus
problématique. Chaque paroisse, ou presque, possédait son
cimetière, souvent petit mais où il fallait entasser le maximum de
personnes, c'est à dire des fosses communes. Enfin, seulement pour
les pauvres, les privilégiés avaient soit leurs propres sépultures,
voire même étaient inhumés à l'intérieur du lieu de culte.
Seulement, les morts s'entassent et le temps passe, autant dire que
c'était la recette parfaite de l'insalubrité, d'odeurs nauséabondes
et des maladies. Rajouter à cela l'aspect esthétique au XVIIIe
siècle, il faut y remédier. Après de nombreuses mesures prises et
le scandale du cimetière des Innocents (actuellement le quartier des
Halles à Paris) se voit fermer en 1785 et les ossements sont
transférés aux Catacombes, d'autres suivront. A Paris aujourd'hui,
il ne reste que deux cimetières paroissiaux : le cimetière du
Calvaire, en haut de la butte Montmartre, et la cimetière de
Charonne, dans le 20e arrondissement. Deux autres furent crées à
l'extérieur de la ville fin du XVIIIe siècle, et tous les autres
datent du XIXe siècle, dont le Père Lachaise.
Napoléon Bonaparte,
alors Premier Consul en 1801, fait créer trois grands cimetières au
nord, à l'est et au sud de Paris. Le premier a recevoir
l'autorisation fut celui de l'est, sur les anciens hectares du
domaine de Mont-Louis, soit environ 17 hectares, pour y installer les
sépultures mais dans les règles d'hygiène, comme le décret du 12
juin 1804 le préconise : « Le cimetière sera un jardin,
on y fera des plantations en prenant des précautions convenables
pour la circulation de l'air. » Et chose nouvelle, il sera
ouvert au public. Dans ces prédispositions suivront vingt ans après
le cimetière de Montmartre au nord en 1824 et de Montparnasse au sud
en 1825. La réalisation est confiée à l'architecte
Alexandre-Théodore Brongniart, qui y sera lui-même inhumé à sa
mort, en 1839. Après quelques années difficiles, le cimetière se
met à accueillir de grandes familles, mais aussi personnalités à
la mode.
Ma (charmante) visite
Début novembre, dans un
doux weekend avec grand soleil, Pipou III (mon appareil photo) et
moi-même sommes partis nous perdre au milieu d'illustre et
d'inconnus. Enfin pas totalement, j'avais un vieux plan pour me
repérer, et voir les personnalités enterrées là, puis un peu
flâner tout de même. Et comme j'oublie toujours des choses, mon
itinéraire fut assez original, on va dire, comme vous pouvez le
constater :
Et encore je me suis mal organisée et il y a des coins entiers non visités. |
J'ai pris plaisir à
prendre des petits chemins, observer les mausolées, les tombes, les
sépultures, sculptures, certaines d'une grande magnificence,
d'autres d'une grandeur élégante, des fleuries, des abandonnées …
Au cœur de Paris et pourtant isolée, je me sentais transportée
dans une autre époque, celle du XIXe siècle, durant la période
romantique où la mort avait un attrait séduisant. Observer les
noms, les dates, trouver des résistants, des enfants, des couples
mariés, des familles au caveau démesuré, chaque tournant donne
lieu à des surprises.
Alors quand on me
demandait à tout prix les tombes de Jim Morrison, Edith Piaf ou
Marcel Proust, j'avais envie de leur dire de se perdre, de regarder.
Certes, moi aussi j'ai cherché Molière et La Fontaine, la famille
Murat, Héloïse et Abélard, Sarah Bernhardt, Frédéric Chopin,
Oscar Wilde, Alfred de Musset … Bref, que de beau monde de tous
milieux, mais je me suis extasiée sur des inconnus aux tombes plus
belles que les illustres. Une bonne balade de plus de 3 heures où je n'ai
pas vu tout le monde, mais où mes yeux se sont extasiés sur les
beautés funèbres de Paris.
Héloïse et Abélard, les amants médiévaux |
Vivant Denon (1747-125), écrivain, graveur, ayant aidé l'organisation du Musée du Louvre à la Révolution française. |
Frédéric Chopin (1810-1849), compositeur |
Elisabeth Stroganoff Demidoff (1779-1818), princesse russe. On raconte que son tombeau mène directement vers les enfers. |
Oscar Wilde (1854-1900), écrivain. Avant, embrasser sa sépulture était sensé porté bonheur. D'où la vitre de protection. |
Alfred de Musset (1810-1857), poète et dramaturge. On ne le voit pas, mais derrière se tient la sépulture de sa soeur. |
Sarah Bernhardt (144-1923), comédienne et demi-mondaine fastueuse. |
Mais il n'y a pas que des célébrités dans ce cimetière, il suffit de lever les yeux pour voir lieux magnifiques. Je vous en propose un petit panel.
Aux beaux jours, je vous conseille cette très belle visite. N'oubliez pas un plan si vous avez envie de voir certaines personnalités, certains sont téléchargeables en ligne, des formats papier sont vendus au marchand de journaux à la sortie du métro, mais ensuite laissez vous porter par une forme curieuse, un trait de lumière, un nom insolite.
J'ai découvert ce cimetière il y a trois ans. Cela ne me ravit pas autant que toi mais c'est une visite "originale" ! Je me rappelle bien de la tombe d'Oscar Wilde. Par contre j'avais pris une visite guidée, car c'est tellement grand
RépondreSupprimerIl y a souvent des visites guidées et ce n'est pas plus mal car on s'y perd rapidement :)
SupprimerCela fait des années que je n'étais pas au cimetière du Père Lachaise, mais j'en garde un excellent souvenir : c'est tellement rare de pouvoir véritablement visiter un cimetière d'exception sans tomber dans une ambiance "glauque" ou funeste. Et merci pour ton approche historique très intéressante !
RépondreSupprimerMerci beaucoup <3
SupprimerOui il y a de beaux cimetières où on n'a pas l'impression de côtoyer la mort, ni tomber dans le pathos, c'est ce qui donne toute l'atmosphère, je pense.
J'ai beaucoup de mal avec les cimetières mais à force d'entendre parler de celui-ci il faudrait vraiment que j'y aille un jour !
RépondreSupprimerJe pense que c'est à faire une fois, histoire de se faire un avis :) Je ne suis pas fan des cimetières, mais celui là a vraiment une atmosphère particulière, je trouve.
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